HOMELIE
DE PAQUES 2022
Lectures :
1.
Vigile :
Gn 1, 1 –2, 2 ; …. ; Rm 6, 3b-11 ; Lc 24, 1-12
2.
Dimanche :
Ac 10, 34a.37-43 ; Col 3, 1-4 (ou 1 Co 6b-8) ; Jn 20, 1-9 (Mt
28, 1-7)
Chers Frères, Chères Sœurs,
Mes Chers Diocésains,
« Voici le jour que fit le Seigneur,
qu’il soit pour nous jour de fête et de joie ! »
(Ps 117, 24)
1.
Ce refrain, qui revient chaque année pour le temps
pascal, devrait habiter nos cœurs tous ces jours-ci : ce jour que fit le
Seigneur est jour de joie, car il est le jour de notre salut. En effet, fêter
Pâques, c’est célébrer notre salut, notre libération de l’esclavage du péché et
de la mort.
2. Cette année, la
célébration de la résurrection du Christ prend pour nous une saveur
particulière. Elle intervient après plusieurs événements qui peuvent nous
plonger dans la tristesse et dans le désespoir. Dans plusieurs coins du monde,
l’on célèbre encore l’eucharistie avec quelques restrictions dues à la Covid-19
qui a ébranlé nos repères durant deux ans, et dont nous ne sommes pas encore
sortis totalement. La guerre en Ukraine
occupe jour et nuit les médias et nous rappelle qu’aucun coin du monde n’est
épargné de la barbarie et de la méchanceté dont sont capables les hommes qui se
sentent ou se croient puissants. Entre-temps, les bruits des bottes n’ont pas
encore pris fin à l’Est de notre pays, malgré toutes les promesses qui nous ont
été faites. Plusieurs familles sont
encore obligées de fuir leurs maisons, d’errer dans nos forêts et villages, et
parfois de se réfugier à l’étranger, avec le drame de familles séparées ou
divisées. Tout ceci, à cause de
l’obscurité du cœur de l’homme, comme celui de ceux qui ont décidé de trahir et
de crucifier le Christ !
3. C’est de ces ténèbres que
le Christ apparaît comme la lumière qui vient éclairer nos vies, pour nous
procurer la paix et la joie. C’est cela
le sens de la Cérémonie des lumières qui inaugure la célébration de la veillée
pascale : le Christ ressuscité est la lumière du monde ; c’est de sa
lumière que nous pouvons voir toute chose nouvelle. D’où l’invitation qui nous est encore faite
aujourd’hui, de sortir de nos ténèbres pour nous laisser éclairer de la lumière
du Christ, de cette lumière pascale. Car, si nous ne sortons pas de nos
ténèbres, nous ne pourrons pas faire l’expérience du Christ ressuscité qui
vivifie notre foi et nous ouvre à l’espérance.
4. C’est cela un des
enseignements de l’évangile de Jean que nous lisons en ce dimanche de
Pâques. Il est dit que, quand
« Marie Madeleine se rend au tombeau de grand matin, c’était encore les
ténèbres ! » (Jn 20, 1). Loin
d’indiquer seulement un élément atmosphérique, les ténèbres indiquent surtout
sa disposition intérieure : elle est encore dans les ténèbres du doute et
du désespoir d’avoir perdu son Maître et Seigneur. Elle est à la recherche, non pas de quelqu’un
de vivant, mais d’un cadavre, incapable de comprendre les Ecritures et toutes
les annonces de la résurrection que Jésus leur a transmises. Comme les femmes de l’Évangile de Luc que
nous lisons à la veillée pascale, elle cherche le Vivant parmi les morts.
5. Comme Marie Madeleine,
dans l’Évangile de Jean proposé pour le dimanche de Pâques, comme les femmes de
l’Évangile du Luc, il nous est demandé de sortir de nos ténèbres, de nos lieux
de morts, pour pouvoir faire l’expérience de la lumière du Christ, de sa
résurrection dans nos vies.
6. En effet, en réalité,
même aujourd’hui, il y a tant de signes qui devraient faire renaître notre foi
à la résurrection du Christ, et à notre victoire sur le mal et sur le péché. On notera que, dans l’Évangile de ce dimanche,
Saint Jean insiste sur la disposition des linges et du suaire qui ont couvert
le corps de Jésus. Cette disposition
montre bien que le corps de Jésus n’a pas été objet de la manipulation humaine
– qui ferait que son corps ait été enlevé, comme le suggérerait l’intervention
de Marie Madeleine dans la suite de cet Évangile. Seulement, elle est tellement plongée dans
les ténèbres de son cœur, qu’elle ne fait pas le pas de foi vers le
Ressuscité. Pierre non plus, témoin de
ces mêmes signes, ne fera pas de prime abord le passage de la foi. Seul le disciple que Jésus aimait fera le
passage de la foi : « il vit et il crut ! » (Jn 20, 8).
7. En effet, seul le
disciple que Jésus aimait pouvait faire ce passage. Notons bien qu’il est question, non pas tant
du disciple qui aimait Jésus, mais bien de celui que Jésus aimait. C’est dire que, pour faire le passage de la
foi, pour être éclairé par la lumière du Ressuscité, il faut nous laisser
enveloppés par l’amour du Christ. Or,
souvent, les ténèbres qui envahissent nos cœurs et habitent nos vies nous
empêchent de nous laisser aimer par le Christ, et donc de voir les signes de sa
présence agissante dans nos vies, même au milieu de nos tribulations
habituelles. Nous laisser aimer par le
Christ pour pouvoir faire l’expérience de sa vie en nous plus forte que la
mort, c’est cela le message que nous transmet l’Évangile de ce jour, et qui
devrait nous renouveler totalement, pour voir toute chose nouvelle dans le
Christ.
8. Aucun péché, aucune
trahison ne peut constituer pour nous un frein pour nous laisser envelopper par
l’amour du Christ qui, seul, peut nous transformer, nous transfigurer, nous
faire briller de sa lumière. Regardons
Pierre. Lui qui n’a pas pu résister à la
tentation de renier le Maître lors de son chemin de croix, il devient le
tenant, le héros de l’annonce de la résurrection du Christ, une fois qu’il
acceptera de pleurer son péché et de se laisser regarder et aimer par le
Christ. La première lecture de ce jour de
Pâques, tirée des Actes des Apôtres, nous le montre : Pierre devient
capable de voir avec un regard nouveau tout son parcours à la suite de Jésus de
Nazareth, en qui il reconnait désormais l’Oint de Dieu. Le chapitre 21 de l’Évangile de Jean nous
relatera l’expérience de Pierre avec le Ressuscité, et sa transformation
radicale, qui fera que, par la suite, il devient le témoin intrépide de la
résurrection du Christ.
9. Notons que, dans le
discours de Pierre que rapporte la première lecture de ce dimanche, Pierre ne
parle pas seulement d’annoncer la résurrection du Christ, mais aussi (et je
dirai, surtout) d’en être le témoin. Il y affirme, en effet, « Dieu nous a
chargés d’annoncer au peuple et de témoigner que lui-même a établi Jésus juge
des vivants et des morts » Act 10, 42).
Pas seulement d’annoncer donc, mais aussi, et surtout de témoigner. Et
est témoin, celui qui a vécu un événement et qui sait le rendre présent et
vivant pour les autres. Nous, chrétiens,
nous sommes ainsi invités, non seulement à annoncer la résurrection du Christ,
mais aussi, et surtout, d’en être des témoins crédibles.
10.
C’est cela le sens de l’interpellation que nous adresse
Saint Paul dans la deuxième lecture de ce dimanche : « Si donc vous
êtes ressuscités avec le Christ, recherchez les réalités d’en haut… » (Col
3, 1). La résurrection du Christ nous
engage donc à avoir notre regard d’abord et toujours tourné vers les réalités
d’en haut, pour que celles d’en bas en soient inondées. J’avais commencé par
parler de tous ces événements de notre monde aujourd’hui qui peuvent nous
conduire au désespoir. Tous ces
événements résultent du fait que souvent les puissants de notre monde, et nous
avec eux, sont attachés à la gloire, aux honneurs et au plaisir d’ici-bas. Il suffit de voir combien ceux qui nous
gouvernent, aujourd’hui comme hier, se complaisent dans la jouissance et
l’enrichissement personnels, sans s’occuper du sort de la population. Et dire que beaucoup d’entre eux se disent
chrétiens, beaucoup d’entre nous nous nous disons chrétiens.
11.
Je vous invite donc, mes chers Frères et Sœurs, mes chers
Diocésains, de vivre la Pâques de cette année de telle manière que la lumière
du Christ ressuscité illumine réellement nos vies de chaque jour, et notre
engagement citoyen et chrétien, nous rappelant, à la suite du Christ, que
« notre vie est cachée dans la vie du Christ ressuscité » (cf. Col 3,
4). En cette année durant laquelle nous
aurons la joie de recevoir le Pape François en visite dans notre pays, je vous
invite à vous préparer intérieurement pour pouvoir le recevoir en pèlerin de
paix et d’amour.
12.
Que le Christ Ressuscité redonne vie à tout ce qui est
mort en nous et autour de nous, et que, par l’intercession de la Vierge Marie,
ce jour que fit le Seigneur soit réellement pour nous jour de fête et de
joie ! AMEN. A tous et à chacun, à toutes vos familles, je souhaite
« Joyeuses Pâques ! »
Inongo, le 16/04/2022 + Donatien BAFUIDINSONI, SJ.
Evêque d’Inongo